Psychic octupus strike again.

WoodBlade a écrit :C'est ce que ce sont dit une partie des français durant l'été 1944....

RACISME : LES DIRIGEANTS DU FOOT FRANÇAIS CONDAMNÉS SANS PREUVES
Le détestable raccourci du titre de Mediapart

Si on m'avait prédit que je serais un jour amené, en plein week-end, à voler au secours du personnel dirigeant de la Fédération Française de Football, j'aurais changé de voyante. Mais la critique médias mène décidément à tout.

Disons-le: je ne comprends rien au film "Mediapart contre la FFF". Ou plutôt, je ne comprends que trop bien. Et ça m'énerve.

De quoi les dirigeants de la FFF sont-ils accusés par Mediapart ? De racisme.
Titre de Mediapart de vendredi (accès payant): "Foot français. Les dirigeants veulent moins de Noirs et d'arabes". Illustré par une photo détournée de son contexte d'un Laurent Blanc imposant le silence (à qui ? quand ?), l'article de vendredi commence ainsi: "Pour les plus hautes instances du football français, l'affaire est entendue: il y a trop de noirs, trop d'arabes et pas assez de blancs sur les terrains. Plusieurs dirigeants de la Direction technique nationale (DTN) de la Fédération française de football (FFF), dont le sélectionneur des Bleus en personne, Laurent Blanc, ont approuvé dans le plus grand secret, fin 2010, le principe de quotas discriminatoires officieux dans les centres de formation de la fédération, les écoles de foot du pays, selon une enquête de Mediapart. L'objectif avoué au sein de la DTN, mais inavouable au grand public, est de limiter, en les triant dès l'âge de 12-13 ans, le nombre de joueurs français de type africains et nord-africains. Une authentique ségrégation appliquée au football."
Dès vendredi, nonobstant le mariage princier, lémédias, tous lémédias, embrayent. Pas un politique passant à proximité d'un micro n'échappe à la question sur "les quotas".

Nouvel article samedi (accès payant), reprenant dans le détail des citations d'une réunion des dirigeants de la FFF, le 8 novembre 2010. (Vue la précision des citations et des échanges, Mediapart possède manifestement, même s'il ne le dit pas, un enregistrement de cette réunion. Elle a donc été enregistrée par un participant. Pourquoi ce participant n'a-t-il diffusé cet enregistrement que maintenant ? Question annexe, à laquelle une réponse sera bienvenue).

Au vu de l'article de samedi, le directeur technique national François Blaquart est suspendu par décision conjointe de la ministre des sports Chantal Jouanno et du président de la Fédération Française Fernand Duchaussoy (absent de la réunion). Autant dire que ça barde.

Or, c'est là que je ne comprends plus. A la lecture du verbatim de la réunion, il me semble que Blanc en tout cas, et Blaquart peut-être aussi, sont lavés de tout soupçon de ségrégation aux motivations racistes. A la lecture de ce verbatim, le titre et le début d'article de Mediapart de la veille me paraissent même scandaleux, et les reprises moutonnières de toute la presse donnent, une fois de plus, la mesure de sa maladie.
LAURENT BLANC, DÉDOUANÉ DE RACISME PAR LE VERBATIM

Qu'apparait-il, dans cette réunion du 8 novembre ? (Je précise que je m'en tiens à ce que publie Mediapart, de cette fameuse réunion. Je n'ai pas d'autres éléments. Je ne sais pas comment les dignitaires de la FFF parlent entre eux, plaisantent entre eux, et ne dispose pas d'un instrument capable de sonder leurs arrière-pensées).

De ce que je comprends, les dirigeants réunis le 8 novembre se posent deux problèmes.

D'abord ce fameux problème des "bi-nationaux" : ces jeunes recrutés dès l'âge de 12 ans dans les centres de la formation de la FFF et qui, ensuite, aux alentours de 25 ans, le plus souvent parce qu'ils savent qu'ils ne seront pas sélectionnés en équipe de France, prennent (ou acceptent) une nationalité étrangère, et intègrent une équipe étrangère. Tous les participants à la réunion déplorent le phénomène.

Comment envisagent-ils de le régler ? En instaurant, à l'entrée des centres de formation, et sans le dire publiquement, des quotas d'enfants ou d'adolescents susceptibles de devenir "bi-nationaux". Blaquart, le DTN suspendu, insiste lourdement, à plusieurs reprises, sur cette exigence de confidentialité. Il ne l'explique pas. On doit en déduire que cette pratique de quotas lui semble illicite. Ou qu'il a peur que tout le monde pense : "ils font des quotas de Noirs". Peur justifiée, dans les faits, au vu de la suite. Justifiée aussi par une réalité : dans les faits, la deuxième nationalité des "bi-nationaux" est celle d'un pays d'Afrique noire ou du Maghreb (encore qu'une enquête approfondie du Monde.fr signale aussi un Polonais).

Dans leur esprit, l'instauration de ces quotas obéit-elle à des motivations racistes ? Non. Le verbatim de la réunion est sans équivoque.

Exemple principal, Laurent Blanc, cité par Mediapart, et par ailleurs favorable aux quotas de "bi-nationaux potentiels" proposés par Blaquart, est très clair : "Moi c'est pas les gens de couleur qui me posent un problème. C'est pas les gens de couleur, c'est pas les gens nord-africains. Moi j'ai aucun problème avec eux. Mais le problème, c'est que ces gens-là doivent se déterminer et essayer qu'on les aide à se déterminer. S'il n'y a que des – et je parle crûment – que des blacks dans les pôles (de jeunes, NDLR) et que ces blacks-là se sentent français et veulent jouer en équipe de France, cela me va très bien".

Reste, aux yeux des dirigeants, un problème. Comment détecter, dès l'âge de 12 ans, les "bi-nationaux" potentiels, ces "gamins qui peuvent changer de nationalité" ? L'échange qui suit donne la mesure de l'embarras (ou de la stupidité, ou les deux) des participants à la réunion.
"GRATTER UN PEU" LES ENFANTS DE TREIZE ANS
Erick Mombaerts: Mais ça, on ne peut pas savoir à 13 ans, quand ils rentrent dans nos structures. On ne peut pas savoir. Ils vont te dire qu'ils se sentent français.
Laurent Blanc: Tu peux les aider à s'identifier...
François Blaquart: Il faut identifier. Parce que bon, c'est pas la couleur qui fait... Il y a des gens qui sont, de toutes façons et fondamentalement, de souche française.
Laurent Blanc: Mais bien sûr. Aussi français que toi et moi.
François Blaquart: Et puis la deuxième chose, je rejoins ce que dit Laurent: sur l'état d'esprit, il faut effectivement gratter un peu...
Erick Mombaerts: Oui, enfin ça va pas être simple.

Cette idée de "gratter un peu", c'est-à-dire de sonder l'état d'esprit d'un gamin de 13 ans, pour savoir, si "plus tard", il pourrait envisager, si on lui demande gentiment, de changer de nationalité, est totalement stupide. On peut la juger odieuse. Mais elle n'est pas, en soi, "raciste". La FFF a-t-elle le droit de régler, par des quotas non-dits, son problème de bi-nationaux ? L'enquête interne le dira. Mais il ne faut pas appeler ça du racisme. On peut dire : "la fédé s'y prend mal". On peut dire : "tout le monde s'excite sur un faux problème, puisque par définition, ce ne sont pas les meilleurs joueurs qui partent à l'étranger". On ne peut pas titrer : "la fédération française veut moins de Noirs et d'arabes". Ce titre est scandaleux.
LE PROBLÈME DES "GRANDS COSTAUDS PUISSANTS"

Deuxième problème, posé par Laurent Blanc à la fin de la même réunion, celui des "grands costauds puissants", que le sélectionneur estime en surnombre. Il se trouve que la plupart des "grands costauds puissants" sont Noirs. Mais c'est peut-être parce qu'on n'a recruté que des "grands costauds puissants" noirs. On doit pouvoir trouver des Noirs ni costauds, ni stupides.

N'étant pas un fin connaisseur des habitudes de recrutement des centres de formation, je m'en remets ici à une interprétation, dans nos forums, d'Ali: "Vouloir changer le type de joueur qui sort des centres de formation, très bonne initiative, parce que tout le foot français en a marre des grands bourrins, mais si jamais dans les réunions ça a été présenté comme le décrit Mediapart, lié à une couleur de peau ou une ethnie, c'est scandaleux et très stupide (...) Parce que déjà, des grands bourrins blancs, il y en a un paquet en L1, mais surtout, si Laurent Blanc voit dans les grands bourrins des Noirs, c'est à cause des centres de formations français qui ont pendant des années, après la coupe du monde 98, privilégier ce type de joueur "noir costaud" (la couleur de peau faisant parti du profil (...) suite aux succès des Desailly, Thuram, Viera, Henry, etc) Le petit noir technique il passait à la trappe autant que le petit blanc technique".

Bref, en l'état de nos informations, la FFF a donc tenté de régler un problème économique (les bi-nationaux) et un problème de tactique de jeu, déterminé par un problème de recrutement. Elle l'a peut-être fait en usant (ou en envisageant d'user) de moyens illicites. Introduire dans ce débat la question du racisme ne rend service à personne. J'ajoute d'ailleurs une chose. A l'exception de l'enregistreur clandestin de la réunion, les autres participants, notamment Blanc et Blaquart, ne savent pas qu'ils sont enregistrés. Or, à aucun moment de cette réunion, on n'y relève de saillie, de remarque, de blague, pouvant être qualifiée de raciste.

Ces informations sont, comme souvent sur Mediapart, très intéressantes. Leur interprétation est détestable.